Skip to main content
Déclarations @frDernières nouvelles

Déclaration d’IHRDA sur la situation des droits de l’homme au Burundi à la 58ème Session Ordinaire de la Commission Africaine

Honorable la Présidente de la Commission, Honorables Commissaires, Mesdames et Messieurs,

Depuis l’annonce de la candidature du Président Pierre Nkurunziza de briguer un troisième mandat le 26 avril 2015, le Burundi traverse une crise qui risque de replonger le pays dans une guerre civile. Les manifestations qui ont suivi cette annonce ont été réprimées avec une force disproportionnée par les policiers, militaires et la milice imbonerakure officiellement reconnue comme Ligue des Jeunes du Parti au pouvoir, le CNDD-FDD.  Après le coup d’état manqué du 13 mai 2015, le gouvernement a assimilé les manifestants aux terroristes et une terrible répression s’est mise en marche contre tous ceux qui sont supposément ou réellement opposés au troisième mandat. La violence a déjà entrainé plusieurs violations des droits de l’homme dont environs 700 exécutions extrajudiciaires, la torture pratiquée par les agents du Service National de Renseignement (le SNR), la détention dans des lieux secrets, les disparitions forcées, les détentions arbitraires, des viols, la fermeture des médias, la fuite d’environ 250 000 Burundais, pour ne citer que ces exemples.

IHRDA salue la mission d’établissement des faits menée par la Commission en dates du 7 au 13 décembre 2015.  Cependant, force est d’observer qu’à ce jour cette mission n’a entrainé aucun changement positif au Burundi. Loin s’en faut. Les arrestations visant les opposants au troisième mandat, souvent suivies de détention dans des lieux secrets et d’exécution arbitraires, sont toujours observées. Il en est de même de la fermeture de certains médias indépendants. Des développements plus préoccupants, comme les assassinats à caractère ethnique au sein de l’armée, se sont accentués.

IHRDA craint que si rien n’est fait dans les meilleurs délais, la crise peut dégénérer en un conflit ethnique aux conséquences néfastes incalculables. Cette préoccupation est fondée sur plusieurs raisons. Premièrement, il existe une milice imbonerakure composée exclusivement des hutus, opérant aux cotés de la police et montant des rondes nocturnes.  Deuxièmement, les discours de haine ethnique sont régulièrement diffusés sur la Radio et la Télévision Nationales du Burundi par le CNDD-FDD. Troisièmement, l’armée est divisée selon l’appartenance ethnique de ses membres et des tueries et enlèvements à caractère ethnique s’observent de plus en plus en son sein. Quatrièmement, au moment où des hutus et des tutsis se sont ouvertement déclarés contre le troisième mandat, y compris au sein même de son parti le CNDD-FDD, le gouvernement en place et le parti au pouvoir n’épinglent que les seules personnes tutsis pour dire que ce sont ceux-là qui sont opposés au régime incarné par le Présidaient Nkurunziza.  Enfin, il existe des allégations sur la présence au Burundi des Forces Démocratiques de Libération du Rwanda, constituées d’anciens interahamwe tristement célèbres pour leur rôle dans le génocide perpétré contre les Tutsi au Rwanda en 1994.

Au regard de tout ce qui précède, IHRDA voudrait demander à la Commission et au Gouvernement burundais de prendre les mesures urgentes nécessaires pour mettre un terme à la crise.

A la Commission, IHRDA demande les mesures suivantes :

  1. Publier le rapport d’enquêtes sur le Burundi pour que toute personne intéressée puisse en prendre connaissance.
  2. Demander au conseil paix et de sécurité de l’UA de déployer dans les meilleurs délais des forces de maintien de la paix au Burundi.
  3. Encourager le gouvernement burundais à entrer dans les négociations avec l’opposition pour trouver une solution rapide à la crise.

A l’Etat burundais, IHRDA demande:

  1. De diligenter une enquête indépendante et effective sur les cas de disparitions forcées, de torture, d’exécutions judiciaires et d’autres violations, et punir les coupables.
  2. S’assurer que les personnes arrêtées par les forces de l’ordre soient protégées contre la torture et jouissent de leur droit à un procès équitable.
  3. Arrêter sans délai les enlèvements opérés par le SNR et la détention des personnes dans des lieux secrets.
  4. Ouvrir les médias fermés, laisser les journalistes exercer librement leur profession et garantir l’égal accès aux médias publics.
  5. Entrer dans les négociations avec l’opposition pour trouver une solution rapide à la crise.
  6. Bannir les propos et discours empreints de haine ethnique et punir les auteurs de tels propos.
  7. Désarmer la milice imbonerakure.

Merci.

 

Faite à Banjul le 06 avril 2016