L’IHRDA et ses partenaires, l’Action contre l’impunité des droits humains (ACIDH) et Rights and Accountability in Development (RAID) ont soumis une plainte devant la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (Commission africaine) contre la République Démocratique du Congo (RDC). La communication dont s’est saisi la Commission africaine lors de sa 48ème Session ordinaire tenue à Banjul, Gambie, se rapporte à des violations des droits humains survenus à Kilwa, RDC, en octobre 2004.
La plainte est introduite au nom de KUNDA MUSOPELO Pierre, d’ULIMWENGU LUKUMANI, d’ULIMWENGU NOMBELE, et deux autres Plaignants qui ont souhaité garder l’anonymat.
Les Plaignants allèguent que le fait pour le gouvernement de la DRC de ne pas avoir pris de mesures visant à faire en sorte que des réparations effectives soient accordées aux victimes des actes perpétrés par les Forces armées congolaises à Kilwa, met en exergue la violation de plusieurs dispositions de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (Charte africaine) par ce pays.
Les Faits
Le 14 octobre 2004 aux environs de deux heures du matin, un groupe composé de 6 à 7 individus, très peu organisé et faiblement armé fait irruption dans la cité de Kilwa. Le groupe s’est réclamé être le Mouvement Révolutionnaire de Libération du Katanga (MRLK), un mouvement rebelle ayant pour objectif l’indépendance de la province du Katanga. Dans la journée du 14 octobre, environ 100 jeunes ont volontairement regagné les rangs du MRLK. A aucun moment, il n’a été rapporté que des violations de droits humains ont été perpétrées par le MRLK à l’encontre des populations de Kilwa.
Par crainte de voir les actions du MRLK perturber ses activités minières, Anvil Mining, une société minière de droit Australien, met à la disposition des militaires de la 62ème Brigade d’infanterie des Forces armées de la République Démocratique du Congo (FARDC) stationnées à Pweto, des camions, des chauffeurs, de l’argent ainsi que des vivres pour les aider à déloger le MRLK. Le 15 octobre 2004, les FARDC, ont lancé une offensive. Au cours de l’opération, des arrestations arbitraires, pillages, des massacres et exécutions sommaires, ont été commises contre les populations de Kilwa.
En entrant la ville de Kilwa, les FARDC ont procédé à des bombardements intensifs qui ont causé la destruction de plusieurs maisons ainsi qu’à des fouilles systématiques à l’issue desquelles ont été arrêtés plusieurs habitants de Kilwa. Vingt huit (28) des personnes arrêtées ont été transférées à NSENSELE où elles ont été exécutées sommairement.
Le rapport d’une enquête de la Mission de l’Organisation des Nations Unies en République Démocratique du Congo (MONUC) entrepris du 22 au 24 octobre 2004 a souligné la mort de 73 personnes, dont 28 ont été victimes d’exécutions sommaires.
Le 12 décembre 2006 s’est ouvert à Lubumbashi, le procès des incidents de Kilwa devant la Cour militaire du Katanga. Etaient poursuivis au cours de ce procès l’officier ayant dirigé les opérations à Kilwa, huit (8) autres militaires, ainsi que trois (3) employés d’Anvil Mining.
Dans son arrêt du 28 Juin 2007, la Cour militaire a acquitté tous les accusés en les déclarant non coupables des faits que l’auditorat militaire leur reprochait et ceci, malgré les témoignages poignants des victimes. Des appels ont été interjetés mais ces appels ont été rejetés sur la base de questions procédurales.
Base juridique de la communication
Les Plaignants allèguent la violation des dispositions suivantes de la Charte africaine par la RDC:
- L’article 1 relatif à l’obligation des Etats parties à la Charte africaine de mettre en œuvre les dispositions de ladite Charte;
- L’article 4 relatif à droit au respect de sa vie et à l’intégrité physique ;
- L’article 5 relatif à l’interdiction de la torture et traitements cruels, inhumains ou dégradants;
- L’article 6 relatif à l’interdiction de la privation arbitraire de liberté ;
- L’article 7.1 relatif au droit à un procès équitable ;
- L’article 14 relatif au droit à la propriété ;
- Et enfin, de l’article 26 relatif au devoir des Etats de garantir l’indépendance des tribunaux.