Banjul, le 7 septembre 2018: Le Comité africain d’experts sur les droits et le bien-être de l’enfant (le CAEDBE) a rendu une décision historique en faveur des plaignants dans l’affaire « Institut des droits de l’homme et du développement en Afrique et Finders’ Group Initiative (pour le compte de TFA, une mineure) c. République du Cameroun », Communication 006/Com/002/2015.
Dans sa décision communiquée aux plaignants le 4 septembre 2018, le CAEDBE a demandé au Cameroun de payer à TFA une indemnisation de 50 millions de francs CFA (soit environ USD 90 000 – quatre-vingt-dix mille dollars), en plus d’autres mesures structurelles recommandées. Ceci est la toute première décision relative à la violence sexuelle sur un mineur au niveau régional.
Selon les faits de l’affaire, TFA avait été violée par un homme riche et influent à Bamenda, dans le Nord-Ouest du Cameroun, en 2012, quand elle avait encore 10 ans. Malgré des preuves médicales convaincantes que la fille avait été violée, les autorités judiciaires camerounaises n’ont pas mené une enquête effective sur les circonstances de l’infraction pour pouvoir poursuivre l’auteur en justice. Par contre, l’avocat et la tante de TFA ont été poursuivis en justice pour diffamation contre le juge d’instruction dans cette affaire, tandis que l’affaire continuait à subir d’ajournements successifs par le Tribunal à Bamenda.
L’Institut des droits de l’homme et du développement en Afrique (IHRDA) et Finders’ Group Initiative (FGI) ont saisi le CAEDBE en novembre 2015, alléguant plusieurs violations des droits prévus notamment par la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant et d’autres instruments juridiques internationaux. Les plaignants ont comparu devant la 30ème session ordinaire du CAEDBE à Khartoum, au Soudan, en décembre 2017, pour une audience sur l’affaire.
Dans sa décision prise lors de sa 31ème Session ordinaire tenue du 24 avril au 6 mai 2018 à Bamako au Mali, le CAEDBE constate que le Cameroun a manqué en plusieurs obligations, notamment la protection contre l’abus et la torture de l’enfant, ainsi que la non-discrimination. En plus de l’indemnisation, le CAEDBE demande au Cameroun de veiller immédiatement à ce que l’auteur du viol soit amené en justice; et d’entreprendre une série de mesures structurelles pour l’élimination de toute forme de violence contre les enfants, y compris la mise en place et l’application des législations pertinentes, la formation des agents/autorités compétentes, la création de mécanismes spécialisés et la sensibilisation du public.
Les plaignants ont fait l’éloge de la décision qu’ils qualifient d’ajout important sur la jurisprudence en matière de droits de l’enfant en Afrique.
Le Cameroun devrait faire rapport au CAEDBE sur les mesures prises pour mettre en œuvre cette décision dans les 180 jours de sa notification.