Addis Ababa, Ethiopie – le 2 mai 2016
Honorable Président, honorables membres du comité africain d’experts sur les droits et le bien-être de l’enfant, je vous remercie pour cette opportunité de m’adresser à vous lors de cette 27ème session ordinaire.
L’Institut pour les droits de l’homme et le développement en Afrique voudrait attirer l’attention du Comité aux pratiques néfastes qui remettent en question les droits de beaucoup d’enfants en Afrique de l’Ouest.
Dans plusieurs pays de la région, surtout au Ghana, il y a une croyance assez courante en sorcellerie. A cause de cette croyance, des enfants accusés d’être sorciers sont chassés de leurs familles et de leurs communautés et placés dans des « camps de sorciers » où ils ne peuvent pas aller à l’école et où il n’existe pas les infrastructures nécessaires pour leur développement.
Par exemple, dans le nord du Ghana, il y a neuf « camps de sorciers » qui ont été établis pour héberger les enfants et les femmes accusés d’être sorciers. Selon des rapports, entre 300 et 700 enfants âgés de 4 à 16 ans, surtout des filles, habitent dans de tels camps dans la région septentrionale de Ghana.
Les victimes sont soit forcées de se réfugier dans ces camps, soit s’y installent volontairement pour échapper aux passages à tabac, à la torture, ou même au lynchage. Ils y vivent dans des conditions atroces; l’eau potable et la nourriture y sont rares. La société les a abandonnés dans la misère, mettant ainsi les jeunes et les personnes âgées dans l’impossibilité de se protéger de façon adéquate.
Les victimes sont forcées de subir des rituels dangereux. Elles sont forcées à consommer des solutions nocives pour être déclarées « purifiées ». Malgré ces rituels de purification, il y a des communautés qui continuent de rejeter les enfants. Entre temps, plusieurs de ces femmes accouchent dans les camps et leurs enfants vivent également dans les mêmes conditions atroces.
En dépit de la persistance de ce phénomène, il y a très peu ou pas d’action de la part du gouvernement pour protéger le bien-être des victimes.
Ces pratiques néfastes violent plusieurs articles de la charte Africaine sur les droits et bien-être de l’enfant, dont les articles 1, 4, 5, 11, 12, 14, 16, 19, et 21.
[En plus des camps de sorciers, il existe la pratique d’exorcisme qui est assez courante dans les pays comme le Nigeria, le Ghana, et la Sierra Leone. Les spiritualistes prétendent pouvoir exorciser la sorcellerie des enfants en utilisant souvent des moyens assez violents tels que le passage à tabac, la privation de nourriture et la consommation des solutions nocives. Beaucoup d’enfants seraient morts ou handicapés suite à l’exorcisme.]Le comité d’experts a un rôle important à jouer pour éradiquer ce phénomène, spécialement en vertu de son mandat de veiller au respect des obligations découlant de la Charte par les Etats, d’appeler les Etats à éradiquer les pratiques néfastes contre les enfants, et de sensibiliser le public aux dangers de ces pratiques. Nous appelons le comité d’experts à prendre note de ces pratiques et à prendre toutes les mesures relevant de son mandat de protection et de promotion pour s’assurer que les droits de ces enfants sont protégés.
Finalement, nous exhortons avec insistance le comité à amorcer un dialogue avec le gouvernement du Ghana en vue d’adopter toutes les mesures nécessaires visant à éradiquer ces pratiques néfastes contre les enfants accusés de sorcellerie, démanteler les camps et s’assurer que des mesures alternatives soient prises en faveur de ces enfants, faciliter la réunification des familles lorsque cette approche est convenable, et sensibiliser le public aux dangers de ces pratiques néfastes.
Merci beaucoup.