Plus de 70 participants sont aujourd’hui réunis à Nouakchott pour discuter de la justice transitionnelle et de la réconciliation en Mauritanie. Le colloque organisé par le Forum des organisations nationales des Droits de l’Homme en Mauritanie (FONADH), Open Society Justice Initiative (OSJI) et IHRDA, rassemble des militants de droits humains, des hommes politiques, des fonctionnaires et des agents des forces de sécurité. Tout un éventail de la société mauritanienne, pour discuter de l’avenir de la Mauritanie et envisager des options pour des modèles de justice transitionnelle aptes a résoudre les questions relatives aux graves violations de droits humains auxquels sont confrontés une frange de la population Mauritanienne. La discussion sera une opportunité pour les participants de témoigner et de partager ouvertement leurs expériences de violations, de lutte pour la justice et des approches pour les options de justice transitionnelle.
Le processus de justice transitoire proposée en Mauritanie cherchera à identifier des options efficaces pour une résolution définitive des violations graves et massives des droits humains commises en Mauritanie entre 1989 et 1992, dénommé «le passif humanitaire». Ces violations ont fait l’objet de plusieurs affaires déposées devant les tribunaux mauritaniens et plus tard une série de communications déposées auprès de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP).
Le 11 mai 2000, la CADHP rendu a une décision historique compilant les 37 communications présentées entre 1991 et 1998 entre ces violations, on constante «des violations graves ou massives des droits de l’homme proclamés dans la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples” et “en particulier , les droits à la non discrimination, la vie, la protection contre les traitements inhumains, cruels et dégradants, la liberté de la personne et contre les arrestations arbitraires, le droit a un procès équitable, la liberté d’expression, d’association, de mouvement ; le droit a la propriété, la santé, la protection de la famille et les groupes vulnérables et la garantie d’une justice indépendante.”
Pour remédier à ces violations graves ou massives, le CADHP a fait les recommandations suivantes:
1. Poursuite des auteurs: “D’ordonner l’ouverture d’une enquête indépendante afin de clarifier le sort des personnes portées disparues, d’identifier et de traduire en justice les auteurs des violations perpétrées à l’époque des faits incriminés. ”
2. Restauration de la nationalité: “De prendre des mesures diligentes en vu de la restitution de leurs pièces nationales d’identité aux ressortissants mauritaniens auxquelles celles-ci ont été retirées au moment de leur expulsion, d’assurer le retour de ces derniers en Mauritanie, ainsi que la restitution des biens dont ils ont été spoliées au moment de ladite expulsion et de prendre des dispositions nécessaires en vue de la réparation des dommages subis par les victimes des événements susmentionnés.”
3. Réparations pour les victimes: “De prendre des mesures appropriées en vue du versement d’une indemnité compensatrice aux veuves et ayants droit des victimes des violations susmentionnées.”
4. Restauration à la vie nationale: “De réhabiliter dans leurs droits avec toutes les conséquences juridiques qui en découlent, les travailleurs abusivement licenciés et/ou mis à la retraite forcée.”
5. Élimination de l’esclavage: “S’agissant des victimes des pratiques avilissantes et dégradantes, faire une évaluation de la situation de telles pratiques dans le pays en vu d’identifier avec précision les causes profondes de leur survivance et de mettre en place une stratégie tendant à leur éradication totale et définitive.”
6. Élimination de l’esclavage: “De prendre des mesures administratives adéquates pour l’application effective de l’Ordonnance n° 81-234 du 9 novembre 1981, portant abolition de l’esclavage en Mauritanie.”
Ce colloque cherche à mettre au point la mise en œuvre de ces six (6) des recommandations, et en particulier, les recommandations 1 et 3. Ce colloque est la suite des précédentes consultations tenues depuis 2007 lorsque le premier président démocratiquement élu de Mauritanie, Sidi Ould Abdellahi, convoque les “Journées Nationales de Consultations” les 20-22 Novembre 2007. Ces consultations ont mené à la mobilisation des actions en faveur du retour volontaire organisé des déportés mauritaniens au Sénégal. Elles ont été suivies par la Conférence sur le renforcement de l’unité nationale en Mauritanie organisé par NDI, les 22-23 Janvier 2008. Le FONADH en partenariat avec OSJI et IHRDA a également organisé des colloques qui ont eu lieu en Décembre 2008, 2009 et 2010 les discussions étaient basées sur le retour des Mauritaniens déportés et les problèmes de réintégration et réparations pour les rapatries. Le 30 mars 2011, l’Office des Nations Unies, le Haut Commissariat pour les droits de l’homme (HCDH) en Mauritanie a également organisé une conférence sur les droits humains et la justice transitionnelle.
Ces nombreuses initiatives témoignent d’un engagement croissant dans la société mauritanienne vers un modèle durable et efficace pour la justice transitionnelle et une résolution définitive de la question de passif humanitaire en Mauritanie.
Voir les articles dans la presse mauritanienne:
Agence Nouakchott d’Information: Une commission « Vérité et réconciliation » en Mauritanie préconisée par des militants de droits de l’Homme
Agence mauritanienne d’information: Colloque à Nouakchott sur la justice transitionnelle et la réconciliation nationale